mardi 18 août 2015

L'Arabe du futur - Tome 2 de Riad Sattouf

Après un premier tome qui m'avait enthousiasmé (voir ici), inutile de dire que j'attendais avec impatience ce second volume de l'autobiographie de Riad Sattouf.

Alors que la première partie s'étendait sur six ans (1978-1984), celle-ci ne relate que deux années de la vie du petit Riad, mais deux années ô combien importantes pour lui.

Après avoir axé son histoire sur celle de ses parents et plus particulièrement celle de son père - issu d'une famille pauvre de Syrie et qui réussira à décrocher un doctorat à la Sorbonne, fervent défenseur du panarabisme, qui avait décidé d'aller former "l'Arabe du futur" dans la  Lybie de Kadhafi, avant de finalement repartir dans son pays d'origine, retrouver son village natal, où il envisage de construire une villa de "grand luxe" - Riad Sattouf rentre réellement dans le vif du sujet ici, en se situant comme élément central du récit, même si, l'ombre du père est toujours très présente.

Riad Sattouf nous raconte donc sa première (et très angoissante) rentrée scolaire, traumatisé par une maîtresse d'école qui prote le voile et des mini-jupes, et qui surtout, joue de la règle sur les doigts comme d'autres distribuent des bons points.
Mais comme toujours avec cet auteur, le tragique est contrebalancé par le comique (le passage de l'achat des fournitures scolaires est juste hilarant). 

C'est aussi durant cette période, grâce à sa cousine Leïla, qu'il découvre la perspective dans le dessin et tout ce que cela lui ouvre comme horizon artistique. Sa relation avec sa cousine est évoquée avec beaucoup de tendresse et de retenue (d'autant plus vu ce qui va lui arriver).

Le regard qu'il porte sur son père change également, à mesure qu'il grandit. Il se fait plus critique envers lui, mais la façon dont il relate les événements (la pitoyable chasse aux moineaux, l'indifférence de son cousin général lorsqu'Abdel-Razak lui demande de le pistonner pour avoir un poste de maître de conférence à l'université, l'achat du magnétoscope etc.) fait que l'on ressent de la sympathie pour cet homme constamment tiraillé entre modernité et traditions, orient et occident, besoin de plaire et envie d'être reconnu pour ce qu'il pense être (et qu'il est sûrement). Bref sa maladresse, son entêtement, sa mauvaise foi parfois, en font un personnage très humain

Il montre aussi sa mère ayant beaucoup de mal à trouver sa place au sein de sa belle-famille ou de la société syrienne (la rencontre avec la femme du général qui baragouine un anglais incompréhensible est vraiment très drôle).

Grâce à sa scolarité et les amis qu'il se fait à l'école, Riad Sattouf dresse un portrait de la Syrie rurale du début des années 80, qui contraste complètement avec la France de la même période (où il retourne entre autre, pour faire du ski). La mise en parallèle des deux mondes (avec deux couleurs différentes) fonctionne vraiment bien et nous permet de comprendre que ces deux univers ont fait de lui ce qu'il est aujourd'hui.

Ce second tome, est dans la continuité du premier, tout en traitant - et c'est normal, vu que l'auteur a grandi - des thèmes un peu plus graves, et est un pur chef d'oeuvre. Riad Sattouf réussit l'exploit de mettre en image des souvenirs personnels et de nous faire ressentir ce qu'il a ressentit à l'époque et qu'il ressent encore maintenant (son ode à la langue et l'écriture arabe est juste magnifique - et instructive). De plus, son père, Abdel-Razak est vraiment un personnage dans le bon sens du terme, qui nous renvoie, nous adultes, à nos propres travers.

Je suis vraiment impatient de lire le troisième et dernier tome, qui devrait normalement sortir en 2016. Vite, vite !

Au fait, la villa de "grand luxe" est devenue de "haute qualité". La suite au prochain épisode !

Note : 17/20


L'Arabe du futur - Tome 2 de Riad Sattouf
Allary / 2015
ISBN : 978-2370730541
160 p. / 20,90€

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Web Statistics