mardi 13 novembre 2018

Le Musée de l'Étrange - Le Sanctuaire des Titans de Régric

C'est en traînant dans une librairie à côté de chez moi que j'ai découvert cette bande dessinée. La couverture très "tintinesque" a immédiatement aimanté mon regard et, après avoir un peu feuilleté la chose, je me suis dépêché de l'acheter et de rentrer chez moi pour la lire (la chose, pas la couverture). Voici ma chronique (à dire en ayant en tête la dernière phrase de l'intro de New-York Unité Spéciale) :

1954. En plein hiver, les journalistes sont conviés à un énigmatique rendez-vous. Arrivés sur place, ils sont accueillis par le célèbre industriel Penaud, qui leur dévoile la raison de leur présence : l'inauguration de son nouveau "Musée de l'Étrange" dédié aux civilisations passées, qui pour certaines d'entre elles apparaissent comme légendaires. Une fois la cérémonie terminée, Elsa Blanquette et Victor Galopin, les deux archivistes du musée se mettent au travail, à savoir répertorier l'immense collection rassemblée par l'explorateur Rocas, ce qui n'est vraiment pas simple. Au cours de leurs investigations, ils vont tomber sur un étrange robot fonctionnant à la vapeur - Monsieur 220 - qui deviendra leur compagnon de route, ainsi - et surtout - que sur un tibia géant, bien que tout à fait humain. Prenant conscience que cette découverte peut à la fois changer le cours de l'histoire et lui faire beaucoup de publicité, Penaud décide de monter une expédition afin de se rendre en Amérique du Sud, sur la piste des géants. Pour cela, il va concocter un rallye automobile sensé relier Paris à Mantequilla capitale du Guacamola, qui se révélera plein de surprises...

Pour être franc, je ne connaissais l'auteur - Régric - que de nom pour l'avoir vu figurer sur les dernières couvertures de Lefranc, le héros de Jacques Martin. Je me suis donc douté que ce style plus ligne claire que la ligne claire était parfaitement assumé et était une sorte d'hommage à Hergé. Ces soupçons ont été très vite confirmés avec la présence de nombreux clins d’œil aux aventures du reporter à la houppe. 
Au niveau du scénario donc, on ne va pas se mentir, on est assez éloigné de l'atmosphère d'un Lefranc, Tintin ou Blake et Mortimer, puisque dès les premières cases on sent que cette histoire sera burlesque du début à la fin, mais sans jamais tomber dans la parodie. L'inauguration du Musée, voire le Musée en lui-même n'est d'ailleurs qu'un MacGuffin, puisque très rapidement, les protagonistes ne s'intéressent plus qu'au tibia géant et à ses origines. 
Cela permet donc de les faire partir en expédition pour certains, et pour les autres d'être confrontés au fantastique (un peu plus poussé et moins inquiétant que celui de Tintin il est vrai), deux  des ingrédients indispensables du diptyque "Les 7 boules de cristal" / "Le Temple du Soleil" dont ce "Sanctuaire des Titans" semble être le rejeton. 
Dans l'ensemble, le récit tient la route dans la mesure où l'on est clairement dans l'humoristique / grand guignolesque (les noms des protagonistes et des lieux nous l'indiquent clairement) plutôt que dans le sérieux de son aîné. On se laisse donc facilement porter par l'intrigue et ses multiples rebondissements, par les personnages haut en couleur et par l'atmosphère vintage qui se dégage du récit. La conclusion est à mon goût un peu trop rapide, mais reste néanmoins dans le ton très bon enfant de l'album.

On ne va pas se mentir, le vrai point fort de cet album, c'est sans conteste ses dessins. On sent que Régric est vraiment à l'aise avec cette ligne claire hergéenne et qu'il a vraiment pris son pied à illustrer son récit finalement un peu bancal mais ô combien sympathique, prétexte à reprendre et empiler les principaux composants d'une bonne histoire du reporter au pantalon de golf. 
Les personnages sont reconnaissables et très agréables à l’œil - pour qui n'est pas allergique à la ligne claire bien entendu - et les décors sont somptueux et mettent vraiment dans l'ambiance. Par moment, j'ai vraiment eu l'impression de regarder des cases d'Hergé que je ne connaissais pas, essayant de trouver tous les détails cachés, comme quand j'étais petit. À ce titre, je trouve que la case centrale de la page 17 aurait méritée une page pleine, pour appuyer encore plus la filiation avec les dernières aventures de Tintin.
Bizarrement, on va dire que sa grande force - à savoir l'hommage très appuyé visuellement jusque sur la couverture au Grand Ancien qu'est Tintin - est également sa plus grande faiblesse, car à trop vouloir se frotter au soleil, on finit par se brûler les ailes (hum, phrase digne d'un poète de comptoir) et alors qu'avec un autre style graphique cet ouvrage sans prétention (si ce n'est celle de divertir) serait passé crème (comme disent les vieux qui veulent paraître jeunes), nous avons ici trop tendance - même inconsciemment - à le comparer au travail d'Hergé, avec lequel il ne peut - et ne veut sûrement pas - lutter.

En conclusion, même si j'ai passé un très bon moment de détente et suis un peu retombé en enfance en compagnie de Henri Penaud, Monsieur 220, Elsa Blanquette et Victor Galopin, il n'en reste pas moins que l'intrigue reste quand même un peu légère et comporte quelques petites incohérences, même si ce n'est finalement ni bien grave ni rédhibitoire. 
En refermant le livre, on se dit que cette aventure burlesque se lit vraiment bien, mais qu'il manque quand même un petit quelque chose, un petit je ne sais quoi, qui aurait pu la rendre peut-être pas indispensable, mais à défaut remarquable. Quoi qu'il en soit, si ce "Musée de l'Étrange" est amené à devenir une série récurrente, j'en serai le premier ravi. À suivre donc !

Note : 14/20


Le Musée de l'Étrange - Le Sanctuaire des Titans de Régric
Éditions du Long Bec / 2018
ISBN : 979-10-92499-93-3
48 p. / 14,50€

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