mardi 29 mai 2018

Intégrale Waki de Luciano Bernasconi, Franco Frescura et Jean-Marc Lainé

Cela faisait un petit moment que je n'avais pas lu une des intégrales Hexagon Classic de chez Rivière Blanche. Pour mémoire, cette collection nous fait (re)découvrir dans des recueils assez volumineux (comptez plus de 500 pages en général !), les séries parues auparavant dans les petits formats publiés par feux les mythiques éditions Lug (Strange, tout ça). Il y a en a donc pour tous les goûts (western, fantastique, guerre, science-fiction, sport etc...). Le volume qui a retenu mon attention aujourd'hui, je le guettais depuis un petit moment déjà. Il s'agit de Waki, une série de science-fiction post-apocalyptique, et ceux qui me suivent (si si, il y en au moins deux) savent que j'adore ce genre. Donc dès que ledit volume est sorti, je me suis précipité pour l'acquérir.  À  noter qu'à sa sortie, cette série n'a malheureusement pas rencontré son public et a donc été trimbalé d'une publication à une autre, avant de s'arrêter brutalement...

Sur une Terre dévastée par une apocalypse nucléaire, les rares humains vivants sont retournés à l'âge de Pierre. Waki, un jeune homme chassé de sa tribu, apparaît un jour aux Dongs, et en devient vite le chef, sinon officiel au moins officieux. Cela déplaît grandement à Sohan, le Sorcier du clan qui, jusqu'à présent, dirigeait celui-ci comme bon lui semblait. Waki convint les Dongs de quitter leur territoire et de partir plus au sud, vers les pays du soleil d'où lui-même est originaire. La longue marche des Dongs vers leur pays de cocagne va se révéler être à la fois exténuante, pleines de surprises et de découvertes, ainsi que semée d'embûches de toutes sortes : autres tribus, animaux sauvages, nature hostile et surtout artefacts d'un temps passé ou futur...

Autant le dire tout de suite, j'ai réellement adoré cette série, aussi bien l'originelle que la suite plus récente. En effet, la série d'origine paraît un peu maladroite et répétitive (et c'est sans doute ce qui n'a pas plus au public de l'époque), mais ce manque de cadrage et d'explication permet d'une part de faire marcher l'imagination du lecteur et d'autre part, a permis à Jean-Marc Lainé qui signe le scénario du "Retour de Waki", de pouvoir intégrer parfaitement Waki dans l'Hexagon Universe (et pas au chausse-pied comme cela est parfois le cas). Ce point est vraiment à souligner, car nous avons affaire ici un tout totalement cohérent avec un début et une fin à l'épopée de Waki et des Dongs (ou Dorgs dans la version "moderne") vers les pays du soleil.

Les dessins de Luciano Bernasconi sont toujours aussi réussis et vivants. Que ce soit dans les scènes d'action ou celles plus contemplatives, il arrive toujours à trouver des attitudes, des postures ou des expressions du visages qui soient réalistes. Les décors, les animaux et le contraste entre les scènes du futur / passé et du présent sont également d'une efficacité redoutable.
Le scénario - qui est signé Franco Frescura - est pour moi un vraie réussite. Lorsque que débute la série, on a le sentiment que l'on va avoir affaire à un récit dans la veine de la Guerre du Feu, puis l'auteur fait surgir du vrai fantastique avec les pouvoirs de Sohan, le sorcier. Celui-ci possède la magie tandis que Waki, n'a pour lui que son intelligence et son sens de l'observation (ce qui n'est déjà pas mal), qui fait donc de lui l'émule d'un Rahan. Cette promiscuité avec le fils des âges farouches est également renforcé par l'inimitié entre Waki et Sohan, puisque Rahan a souvent maille à partir avec des sorciers profitant de la crédulité de leurs tribus pour en tirer un pouvoir personnel. Mais cette comparaison s'arrête là, puisque Franco Frescura a eu la très bonne idée faire intervenir dans son récit à la fois des OOPArts et des visions d'un autre temps dont on ne sait précisément s'il s'agit du futur, du passé, d'un peu des deux ou carrément d'une autre réalité.
Ces questions ouvertes au début, donnent une vraie profondeur à l'univers de Waki. De même, le fil conducteur de la série - à savoir le voyage des Dongs vers les pays du soleil - est avant tout un prétexte permettant à la tribu de Waki de parcourir le monde, de rencontrer toutes sortes de tribus et de découvrir des artefacts fabuleux. Ces derniers points éclipsent d'ailleurs totalement la quête de la tribu la plupart du temps.
J'ai également apprécié que, pour une fois, l'on sorte du trio traditionnel des séries de petits formats (à savoir le héros, la jolie fille amoureuse du héros et le side-kick rigolo) et que le ressort narratif repose sur la dualité entre le bon Waki et le méchant Sohan (et cela même si Jasma et Grunt étaient à même de remplir les rôles classiques évoqués plus haut). Finalement ceux-ci sont relégués en arrière plan, ce qui permet mettre en avant le duel permanent entre les deux héros que sont finalement Waki et le sorcier.
Ce mélange de Rahan, de Kamandi, et de Planète des Singes (ce qui est normal quand on évoque Kamandi) est une vraie réussite dans le fonds mais peut-être un peu moins dans la forme avec des épisodes qui sont finalement assez répétitifs les uns par rapport aux autres (Sohan et Waki se détestent, l'un prend l'ascendant, puis le perd, et inversement; la rencontre avec les différentes tribus, le côté un peu fourre-tout de l'univers etc...), ce qui à mon avis explique le désintérêt assez rapide du public lors de la publication. Bizarrement, j'ai trouvé que cela ne fonctionnait pas si mal que ça si l'on considère la série dans son intégralité. Les différentes influences sont bien assimilées (sauf pour le côté "Rahan" des inventions de Waki) et l'ensemble des histoires se lit sinon d'une traite, au moins avec beaucoup de plaisir. Pour ma part, je ne regrette absolument pas mon achat - bien au contraire - et je pense que cette série est vraiment sous-estimée car elle fourmille de très bonnes idées (des fois pas très bien exploitée il est vrai). Elle rejoint donc la série Wampus originale (des mêmes auteurs d'ailleurs) au panthéon des séries Lug / Hexagon Classics que je relis (ou relirai) avec un plaisir à chaque fois renouvelé !

À noter également que chaque épisode de la série s'ouvre sur la couverture du petit format d'origine qui sont à couper le souffle (car œuvre de l'immense Jean Frisano). Cela apporte vraiment quelque chose au recueil et je tenais à remercier Rivière Blanche pour cette super initiative.

Le volume est complété par une histoire intitulée "50 damnés Stukas", œuvre également de Luciano Bernasconi. Dans celle-ci, un soldat anglais, le Capitaine Fullmer est désigné volontaire par son État-Major pour mener à bien une mission quasi suicidaire : empêcher les avions nazis (I hate these guys !) de décoller et de venir pilonner les troupes alliées qui se débandent gentiment en espérant rejoindre Dunkerque et embarquer pour l'Angleterre. Pour cela, Fullmer va devoir se rendre en Belgique et trouver un moyen de "convaincre" le Colonel Stein de ne pas faire décoller ses "50 damnés Stukas"...

Il s'agit d'une classique histoire de guerre se déroulant durant la Seconde Guerre mondiale. Je ne suis pas un grand fan de ce genre d'histoires en règle générale, mais je dois avouer que j'ai passé un bon moment à la lecture de celle-ci. Les dessins de Bernasconi sont toujours aussi réussis et agréables à l’œil, et le scénario, même s'il n'a rien d'original, n'en est pas moins efficace. Il y a de l'action, du suspense, un gentil héros, des résistants un peu méfiants au premier abord, des méchants qui se font tabasser à tour de bras et des rebondissements un peu téléphonés, mais bien dans le ton du récit. Donc rien d'exceptionnel, mais pas inintéressante pour autant.

En conclusion, comme évoqué plus haut, j'ai vraiment passé un très bon moment avec le gentil Waki, le terrible Sohan, le débonnaire Grunt et la douce Jasma et je conseille à tous les curieux amateurs de post-apo de jeter un coup d'œil à cette série, qui mérite réellement que l'on s'intéresse à elle.

Note : 17/20


Intégrale Waki de Luciano Bernasconi, Franco Frescura et Jean-Marc Lainé
Rivière Blanche / Hexagon Classics / 2018
ISBN : 978-1-61227-745-5
544 p. / 35€

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